L’explosion des télécoms en Afrique subsaharienne : en 10 ans, 5 à 10 fois plus de téléphones mobiles que de télévisions ou de comptes bancaires !

Par Bernard M.
Publié le 15 juin 2010 à 11:25

Une note commune du programme Afrique Subsaharienne d’Ifri (Institut Français des Relations Internationales) et du cabinet de conseil BearingPoint met en perspective les enjeux financiers des télécoms sur le continent. Cette note est basée sur les travaux des équipes Emerging Markets de BearingPoint et à fait l’objet de plusieurs relectures (peer review) par les chercheurs de l’Ifri

Les télécommunications ont pris une importance significative dans l’économie de la plupart des pays africains. En cela, ce secteur est une source indéniable de croissance économique et de développement : le nombre de souscripteurs sur le continent africain est ainsi passé de 51,8 millions en 2003 à 246 millions en 2008, avec un taux de pénétration qui s’établit désormais à 33% en 2008 contre 0,8 % en 1998.



Les recettes des services télécom représentent au final près de 5% du PIB des États africains. Au-delà de la généralisation du téléphone mobile en Afrique, l’impact positif des télécoms dans les pays en développement a été attesté par des travaux économétriques. Des économistes ont en effet récemment montré au travers d’une étude dans 38 pays émergents, qu’entre 1996 et 2003, un gain de 10 points en pénétration de téléphonie mobile entrainait une hausse additionnelle de à 0,59% pour le PIB/habitants (pour la GSMA –Association GSM- cette croissance s’élèverait même à 1,2% du PIB en Afrique sub-saharienne). Cela s’explique par les importantes économies de coût de transport générées, la création d’emplois (en 2007, près de 3,5 millions de personnes en Afrique travaillaient de manière indirecte pour les télécoms), le développement de l’esprit entrepreneurial (initiative Grameen Telecom), le développement de l’enseignement à distance…



La sphère financière est impactée à trois niveaux par l’explosion de télécom en Afrique subsaharienne. Tout d’abord, c’est particulièrement vrai dans les flux financiers à proprement parler. Le m-payment connaît en Afrique en effet, un succès considérable en permettant l’accès à des services tels que le paiement en ligne, la bancarisation et le paiement en ligne, la bancarisation et le micro-crédit. Mais aussi, les transferts d’argent internationaux représentent une nouvelle étape pour la téléphonie mobile. Cela se traduirait concrètement par la possibilité de transférer des fonds par le débit d’un forfait téléphonique par exemple.



Ensuite les opérateurs télécoms sont souvent les premiers contributeurs fiscaux. Actuellement, le marché de la téléphonie mobile génère 7% des recettes fiscales totales de la région. Huit gouvernements imposent même une « taxe de luxe » sur les communications… une situation qui n’est pas sans poser de nombreuses questions sur les enjeux économiques pour les gouvernements du continent.



Enfin, l’étude de l’Ifri et de BearingPoint démontre que l’on assiste à la constitution d’une bulle des télécoms en Afrique avec des valorisations importantes des licences et des opérateurs ; cette bulle n’est pas loin de devoir se confronter aux difficultés de remboursement d’échéance de dettes des groupes considérés. On estime que les opérateurs télécoms ont contracté plusieurs dizaines de milliards de dettes pour financer leurs projets d’expansion et d’acquisition.



Si la téléphonie mobile a été et reste un formidable catalyseur de progrès, l’accès à Internet, sera le prochain grand défi. Sur cette question l’Afrique sub-saharienne est la région la plus en retard au monde. Les enjeux sont donc considérables.



La note de l’Ifri et de BearingPoint livre une analyse complète de ces trois phénomènes et illustre des enjeux clés dans les années à venir, associés au secteur des télécoms en Afrique. Elle s’inscrit parfaitement dans le contexte des annonces fortes depuis le début de l’année des grands opérateurs de la région (Orange, MTN, Orascom, Barthi, Vodafone, etc.)