Les biofilms : découverte d’un nouveau mode de propagation des virus

Par Bernard M.
Publié le 22 décembre 2009 à 10:20

Des chercheurs de l’Institut Pasteur et du CNRS viennent pour la première fois de
démontrer que certains virus sont capables de se regrouper pour constituer des
structures complexes similaires aux biofilms bactériens. Ces formations, qui
assureraient une protection des virus face au système immunitaire, leur permettent une dissémination très efficace de cellule à cellule. Les « biofilms viraux » constitueraient un mode de propagation majeur pour certains virus. Ils apparaissent donc comme de nouvelles cibles thérapeutiques particulièrement intéressantes.

Des chercheurs de l’Institut Pasteur et du CNRS viennent pour la première fois de

démontrer que certains virus sont capables de se regrouper pour constituer des

structures complexes similaires aux biofilms bactériens. Ces formations, qui

assureraient une protection des virus face au système immunitaire, leur permettent une dissémination très efficace de cellule à cellule. Les « biofilms viraux » constitueraient un mode de propagation majeur pour certains virus. Ils apparaissent donc comme de nouvelles cibles thérapeutiques particulièrement intéressantes. Des chercheurs de l’Institut Pasteur et du CNRS dirigés par Maria-Isabel Thoulouze et

Andrés Alcover, au sein de l’unité de Biologie cellulaire des lymphocytes, en collaboration

avec Antoine Gessain de l’unité d'Epidémiologie et physiopathologie des virus oncogènes, et

avec l’Imagopole, viennent de mettre en évidence, pour la première fois dans le monde viral,

des structures de types « biofilms », formées par le rétrovirus HTLV-1 à la surface des

cellules qu’il infecte. Il s’agit d’agrégats de virus et de matrice extracellulaire riche en sucres,

secrétée par la cellule, et dont la synthèse est commandée par le génome du virus, intégré

dans le génome cellulaire.

Le virus HTLV-1 (virus de la leucémie humaine des cellules T du type 1) est le premier

rétrovirus humain à avoir été isolé, en 1980, trois ans avant la découverte du VIH, rétrovirus

responsable du sida. Il infecte quinze à vingt millions de personnes dans le monde, et est à

l’origine de pathologies diverses, de la leucémie/lymphome T de l’adulte à des formes de

neuromyélopathie (paraparésie spastique tropicale) ou à d’autres syndromes inflammatoires

chroniques, comme les dermatites infectieuses, des uvéites ou des myosites. On savait déjà

que la transmission de ce virus dans l’organisme de l’hôte infecté se faisait uniquement par

contact de cellule en cellule, mais le mécanisme de cette transmission restait encore

inexpliqué.

Au sein du biofilm, véritable manteau protecteur et adhésif, HTLV-1 se transmet beaucoup

plus efficacement qu’à l’état libre et unitaire. En éliminant le biofilm viral de la surface des

cellules infectées, les chercheurs ont en outre réduit de 80% le taux d’infection, soulignant

ainsi l’importance que représente ce mode de transmission pour HTLV-1.

Chez les bactéries, les biofilms sont déjà connus depuis longtemps. Sur l’émail de nos dents,

ils forment la plaque dentaire. On en trouve également dans les installations industrielles, au

sein de notre propre flore intestinale. Lorsqu’ils colonisent les implants médicaux, comme les

prothèses ou les cathéters, ils peuvent être source d’infections à répétition. Pour ces raisons,

les biofilms bactériens font l’objet de nombreuses recherches visant à limiter leur

développement et à les rendre perméables aux traitements anti-bactériens.

Les scientifiques cherchent à présent à caractériser les mécanismes de production de ces

biofilms viraux, et à déterminer si d’autres virus que HTLV-1 forment de telles structures.

Pour les virus formant de tels biofilms, il serait intéressant de redessiner des stratégies

thérapeutiques anti-virales, qui viseraient non seulement le virus lui-même, mais la formation

de ces biofilms viraux.chercheur