
On savait que la destruction des tissus cutanés était due à une molécule lipidique originale, appelée mycolactone, qui est abondamment produite par les bacilles. Les équipes de Caroline Demangel à l’Institut Pasteur à Paris et de Marie-France Carlier, au CNRS de Gif-sur- Yvette ont permis d’identifier son mécanisme d’action et ses cibles à l’échelle moléculaire.
En collaboration avec d’autres groupes de l’Institut Pasteur et des Universités de Bâle et de Cambridge, elles ont démontré que la mycolactone diffusait dans les cellules épithéliales pour déréguler la synthèse du squelette cellulaire, dit « cytosquelette » formé par des filaments d’actine. Or, cette charpente très dynamique est essentielle pour maintenir la jonction des cellules de l’épiderme entre elles, ainsi que leur migration coordonnée en cas de blessure. En activant de manière incontrôlée la synthèse de ce cytosquelette, la mycolactone compromet donc à la fois la cohésion des tissus cutanés et leur potentiel de cicatrisation.
Les traitements actuels contre l’ulcère de Buruli, basés sur une lourde antibiothérapie parfois couplée à une chirurgie d’excision des lésions, sont inadaptés aux conditions de terrain. Bloquer l’action ulcérative de la mycolactone permettrait certainement de les alléger, voire de les éviter. L’identification des cibles moléculaires de la mycolactone, les protéines de la famille Wiskott-Aldrich, permet d’aborder la recherche d’inhibiteurs fonctionnels de cette
toxine, qui constitueront peut-être les outils thérapeutiques de demain.
Ce travail a reçu le soutien financier de l’Agence Nationale de la Recherche, l’Association Raoul Follereau, la Communauté Européenne, La Ligue contre le Cancer et la région Ile de France qui a accordé à Romain Veyron-Churlet une allocation de recherche post-doctorale.