A lui seul il incarne l’espoir d’une nation
Publié le 25 février 2011 à 15:22
De passage à Paris le weekend dernier, le directeur général du FMI s’est retrouvé sous le feu de tous les projecteurs et son interview lors du journal télévisé de France 2 aura rassemblé plus de sept millions de téléspectateurs. A l’évidence ce n’était ni pour écouter la bonne parole du Fonds Monétaire International, ni pour recueillir davantage d’informations sur la situation des pays de l’Union où la rigueur a dû être imposée.
Dominique Strauss-Kahn, il y a cinq ans, devait, en se rasant le matin, rêver : son arrivée à l’Elysée, il la voulait et il en avait pris la mesure et l’épaisseur en se présentant aux primaires socialistes, convaincu que sa ligne politique modérée l’emporterait sur la démagogie militante.
Fatale erreur, les règles du jeu ne lui étant nullement favorables, il s’est fait coiffer au poteau par l’actuelle présidente de la Région Poitou-Charentes soutenue par les militants, qui, manifestement, ne pas grand-chose à voir avec les sympathisants. Il doit souvent se remémorer cette soirée du 16 novembre 2006 au terme de laquelle il fut battu ne recueillant que 20% des suffrages d’un scrutin de trop. Pour lui. Pour la France. Et pour nos compatriotes aussi.
Après la défaite de Ségolène Royal à l'élection présidentielle, face à Nicolas Sarkozy, Dominique Strauss-Kahn appelle à une rénovation du PS, vers une voie sociale-démocrate, à l'image du tournant pris par beaucoup de partis socialistes européens. Cette vision d’une gauche moderne et décomplexée, il tentera de l’importer dans son propre mouvement mais aussi de l’exporter aux autres formations amies ou alliées. Or si d’autres pays ont pu faire cet aggiornamento et permettre ainsi aux socialistes de conserver le pouvoir durant des années, la France continue à faire figure d’exception car les femmes et les hommes qui incarnent la gauche française, les « éléphants » d’antan, font davantage figure de boulet, de handicap qu’autre chose. Finalement, les socialistes de l’ère Mitterrand, ayant échoué sur bien des points, apparaissent plus utopistes que réalistes, plus opportunistes qu’humanistes.
Nombreux sont celles et ceux qui n’imaginaient pas qu’un noir puisse un jour accéder à la Maison Blanche et nombreux sont également celles et ceux qui excluent qu’un juif puisse un jour arriver au sommet de l’Etat. Barak Obama a fait taire les mauvais augures outre-Atlantique et Dominique Strauss-Kahn pourrait bien un jour faire taire ceux qui continuent de ne fonctionner qu’avec des clichés devenus obsolètes voire caducs.
HEC et Science Po, Dominique Strauss-Kahn a raté le concours d’entrée l’ENA, un faux-pas qui lui coûtera cher en politique car l’ascenseur social de cette caste fonctionne grâce et avec la loge quasi maçonnique de la corporation des anciens élèves de l’Ecole Nationale d’Administration, grande école qui a fourni au pays depuis sa création la quasi-totalité de ses dirigeants politiques.
En 2011, le paysage s’est transformé. La cohabitation n’est plus qu’un mauvais souvenir et l’ouverture pratiquée par le Président Sarkozy un essai qui n’a pu être transformé comme nos compatriotes l’eurent souhaité.
Il n’est pas facile de gouverner alors que pouvoirs et contre-pouvoirs s’entrechoquent sans cesse, il n’est pas facile de réformer avec tant de petits privilèges et onces de pouvoir que ceux qui les détiennent ne veulent les abandonner.
Dominique Strauss-Kahn occupe aujourd’hui une position en tous points extraordinaire au premier sens du terme. Il est à un poste d’observation exceptionnel qui parachève sa formation comme son expérience et son action, différente de celle de ses prédécesseurs, donne de la voix aux socio-démocrates qui ne veulent, au rang des démocraties, ni du libéralisme sauvage, ni des régimes collectivistes comme modèles d’inspiration.
Proposé par Jean-Claude Juncker et Romano Prodi, activement soutenu par Nicolas Sarkozy, Dominique Strauss-Kahn est, depuis l’été 2007, un acteur majeur de l’économie mondiale et le hasard a voulu qu’il ait à peine investi de sa mission à gérer, avec les grandes puissances de la planète, la grande crise financière de l’été 2008.
En 2011, Dominique Strauss-Kahn a conquis le cœur des Françaises et des Français, ce semble certain si l’on se réfère aux sondages et autres études d’opinion mais cela ne fait pas de lui pour autant notre futur Président. D’autres, avant lui, au sommet de leur popularité, n’ont su la transformer.
Mais lui, il a l’avantage de plaire aux sympathisants de droite autant qu’à ceux de gauche de par son côté modéré. Il rassure. Il incarne l’espoir. Il ne lui reste plus qu’à se déclarer et à mener campagne. Mais il sait que seul il n’y parviendra pas mais que dans son parti il ne compte pas que des amis.
Il conserve toutes ses chances cet hiver de l’emporter si des élections devaient se tenir actuellement mais ces atouts peuvent s’écorner et se déliter au gré d’une campagne dure et fratricide à laquelle l’opposition actuelle nous a, à ses dépens, habitués.
Bernard Marx